L’Europe est à un tournant de son histoire, coincée entre une adolescence politique et une maturité démocratique. Pour garantir sa pérennité, l’Union Européenne doit évoluer d’une structure rigide, construite autour des États, vers une véritable démocratie où les peuples européens sont au centre des décisions, et non uniquement leurs gouvernements.
Jusqu’à présent, les décisions majeures de l’Union Européenne ont été largement façonnées par les gouvernements des États membres, privilégiant une vision où l’Europe est perçue comme une mosaïque d’intérêts nationaux plutôt que comme un ensemble collectif de citoyens européens. Dans ce cadre, les Européens ne peuvent s’exprimer qu’au travers de leurs États respectifs, et non en tant que citoyens d’une Europe unie et porteuse d’une idée européenne. Bien que cette représentation indirecte ait permis de poser des bases solides pour l’Union, elle reste rigide et limite l’expression individuelle de chaque citoyen.
Pour que l’Europe devienne véritablement « l’Europe des Européens », il est essentiel que chaque citoyen puisse participer aux décisions, notamment sur des questions aussi importantes que la libre circulation, la politique migratoire, et la sécurité économique. Toutefois, pour que cette participation soit réellement constructive, il est crucial d’établir des règles communes et équitables qui garantissent la stabilité et évitent que chaque groupe de 10 personnes ne change les lois tous les mardis.
L’objectif doit être de trouver un équilibre entre la participation directe des citoyens européens et la préservation de règles communes, stables et partagées, qui permettent une vision à long terme sans tomber dans une démocratie fragmentée. En intégrant directement les voix des citoyens dans un cadre bien défini, l’Europe pourra se rapprocher de ses idéaux démocratiques tout en garantissant une cohérence et une durabilité qui profitent à tous.
L’idée d’attendre que les peuples adoptent tous une mentalité d’une vision unilatérale avant d’élargir leurs droits de vote a été une erreur stratégique. Au lieu d’unir les peuples, cette approche a accentué le fossé entre les citoyens et les institutions européennes, donnant parfois l’impression que l’UE est une élite éloignée des préoccupations locales. Ce manque de représentation directe a contribué à creuser le mécontentement populaire, laissant place aux discours nationalistes et à la montée des frustrations. Pour que l’UE soit un projet partagé et durable, il est essentiel que ses citoyens se sentent entendus et représentés.
Les récentes élections américaines reflètent un ras-le-bol croissant des citoyens face à des politiques perçues comme déconnectées de leurs réalités. En Europe, un sentiment similaire émerge. Restaurer un pouvoir de vote direct aux Européens renforcerait non seulement leur engagement envers le projet européen, mais aussi leur sentiment de proximité avec les institutions.
L’Europe n’est pas les USA. Contrairement aux Amériques, où des populations ont convergé vers une terre nouvelle, l’Europe est façonnée par des siècles d’histoire et de liens culturels profonds. Cette diversité culturelle est précieuse, et imposer un brassage rapide entre populations européennes est contre-productif. Cela ne signifie pas qu’il faille abandonner l’idée d’un rapprochement, mais qu’il convient de le construire progressivement, en privilégiant des échanges volontaires entre les régions. Il est essentiel d’encourager un conservatisme qui se limite aux frontières de l’Europe, plutôt qu’à celles de chaque nation, afin de favoriser l’unité et éviter l’isolement des pays européens les uns des autres.
Encourager les interactions entre Européens sans les imposer laisse le temps aux différentes cultures de se connaître et de s’apprécier mutuellement, plutôt que de simplement permettre à des entreprises de casser des marchés locaux ailleurs. En respectant cette approche, l’Union Européenne se rapprocherait d’une véritable communauté de citoyens, fondée non sur des décisions imposées, mais sur une ouverture progressive et choisie, renforçant l’unité tout en honorant la diversité européenne.
Continuer à laisser la situation s’envenimer, où chacun reste dans le déni et où seules les politiques extrêmes captent l’attention, ne sera pas non plus une solution d’avenir pour l’Union Européenne. Il serait regrettable que ces politiques extrêmes parviennent à jeter le bébé avec l’eau du bain, risquant de détruire l’idée même d’une Europe unie tout en accentuant les divisions entre les nations européennes.
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